salle A2.1-2

L’étranger, extraneus, est celui qui n’est pas à l’intérieur de la communauté, celui qui se situe aux marges, à la périphérie du groupe, qui n’y appartient pas. Cette extranéité de l’étranger fonctionne comme un marqueur indélébile, un stigmate. L’étranger est celui dont l’identité se trouve aliénée par le discours de celui qui le désigne. L’étrangeté de l’étranger lui vient donc de l‘extérieur, du regard d’autrui qui juge, classe
et distingue. L’étranger est donc d’abord étranger à lui-même avant de l’être pour les autres. Il circule dans les imaginaires entre le réprouvé et le déviant, mais il demeure toujours sous l’effet des normes juridiques et morales qu’édicte la société. L'étranger est aussi objet de discours polyphoniques : ceux de tous les exotismes, de la découverte, de l’échange, du colonialisme, de l’envahisseur, du traitre, etc. L'étranger se décline en multiples figures inquiétantes, intrigantes, fascinantes, mais il se condense aussi en une essence ; il devient alors l’Etranger, avec la majuscule des entités abstraites. Une Idée. L’étranger est, mais son état est absence. Il n’est pas tout à fait de ce monde, mais il est celui par qui l’on passe pour s’interroger sur soi. L’étranger est donc un détour qui ramène à soi. Sa couleur m’interpelle, son statut me positionne, sa
fragilité me conforte. L’étranger entre toujours à son insu dans une dialectique perverse de la domination, comme l’ont si bien montré Franz Fanon et Albert Memmi.
L’ambition de cette journée d’étude est de nous interroger, dans le cadre d’un dialogue interdisciplinaire, sur les processus de fabrication de l’Autre comme étrangeté. Nous souhaiterions que les contributions portent sur quelques expériences anciennes ou contemporaines de mise en étrangeté afin de discuter de la manière dont les imaginaires de l’étranger ont contribué à légitimer des pratiques d’annexion de l’étrangeté
par le droit, l’action publique, la littérature, etc. Bref, de retrouver quelques-unes des trajectoires de l’invention de l’étrange étranger.
Programme de la journée :
9h00- Accueil des participants
9h30-Mot d’accueil - présentation
9h45-Claire Dubois
Maître de conférences en études irlandaises à l'Université Lille 3, CECILLE
Les représentations des communautés irlandaises en Grande-Bretagne
XVIIIème-XXème siècle.
10h30- Aude Rabaud
Maître de conférences en socio-anthropologie à l’Université Paris 7 Diderot
L’ethnicisation des rapports sociaux en France à l’épreuve des savoirs
et des pratiques.
11h15- Maïtena Armagnague
Maître de conférences en sociologie
Institut d’enseignement supérieur de la recherche Handicap et besoins éducatifs particuliers
Education nationale et catégories institutionnelles :
quelles précautions, quels enjeux ?
12h00/14h00 Pause déjeuner14h15-Sophie Wahnich
Directrice de recherche CNRS, Transformations radicales des mondes contemporains /
Institut interdisciplinaire d’anthropologie du contemporain
L’étranger de la période révolutionnaire.
15h00-Stéphane Haber
Professeur de philosophie à l'Université Paris Ouest Nanterre La Défense, Sophiapol
Autour de la notion d’aliénation.
15h45-Débat conclusif