Journée d'étude "Perdre la victoire"

Journée d'étude "Perdre la victoire"

Journée d'étude virtuelle
 
PERDRE LA VICTOIRE

Mercredi 7 avril 2021
 
En 216 avant notre ère, alors que l’armée romaine est écrasée à la bataille de Cannes, le chef carthaginois Maharbal, sidéré par le refus d’Hannibal de prendre d’assaut Rome, l’aurait admonesté : « Tu sais vaincre, mais tu ne sais profiter de la victoire ! » (Tite Live, Histoire romaine). Quelques années plus tard, cette fatale indécision amène le stratège carthaginois à une défaite totale face à la nouvelle armée romaine, reforgée, et ayant tiré les nécessaires leçons de sa défaite. En 1871, alors que le nouveau Reich allemand célèbre triomphalement sa victoire et son unification, Friedrich Nietzsche est loin de partager cet enthousiasme. Au contraire, il en redoute les funestes conséquences : « une grande victoire est un grand danger. La nature humaine supporte plus difficilement la victoire que la défaite » (Considérations inactuelles, 1871). En 2017, un sondage annonce que près de 60 % des vétérans américains considèrent les guerres d’Irak et d’Afghanistan – où les États-Unis, après une victoire éclair, furent embourbés dans un conflit irrégulier – comme des combats menés en vains (« Irak et Afghanistan : des guerres vaines, pour 60 % d’ex-militaires américains », L’Express, 2019).

Les ambiguïtés, les sentiments fugaces et éphémères de succès accompagnent les lendemains de la victoire, et ce des temps antiques aux guerres les plus récentes. Loin d’assurer au vainqueur une couronne de lauriers, la victoire peut constituer la première marche vers sa déchéance, si ce n’est vers son tombeau. Il s’agirait d’étudier alors ce qui semble être de premier abord un paradoxe : « Perdre la victoire », montrer comment dans une victoire se cache les germes de la défaite à venir. La perspective interdisciplinaire choisie pour cela nous rattache au domaine des War Studies. En amenant au dialogue plusieurs disciplines, l’histoire, la philosophie, les sciences politiques, les études littéraires et des « retex » de praticiens, nous entendons souligner les possibilités offertes par l’étude de cette thématique.

L’étude des défaites a, en effet, été depuis deux décennies l’objet d’un intérêt renouvelé parmi divers champs disciplinaires. En 2002, Jenny Macleod dirige Defeat and memory: cultural histories of military defeat in the modern era, année où Pierre Laborie et Patrick Cabanel, à la suite d’un colloque ayant fait date, publient Penser la défaite. À la suite de ces travaux, Corinne Defrance dirige en 2016 le recueil Vaincus, histoires de défaites, Europe, xixe – xxe siècles. En 2017, Gérard Chaliand s’intéresse à l’incapacité occidentale à l’emporter dans de nombreux conflits irréguliers depuis la guerre du Vietnam (Pourquoi perd-on la guerre ?). Enfin, suite à la commémoration des quatre-vingts ans de la « débâcle » de 1940, cette journée souhaite poursuivre les travaux entamés, à l’automne 2020, par l’armée de Terre dans sa revue Inflexions dont l’objectif est de penser « l’échec ». En analysant les « victoires perdues » nous cherchons suivre cette réflexion, non pas en analysant les conséquences éventuellement positives d’une défaite (réelles ou imaginées) mais en traitant des suites négatives d’une victoire.

Programme
 

Pour recevoir le lien et assister à distance à cette journée, envoyez un mail à perdrelavictoire@gmail.com
La journée sera enregistrée, le lien sera disponible après la journée.

Journée d'étude organisée par l'IRHiS en partenariat avec Sciences Po Lille.